Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation le 10 octobre dernier, la haute juridiction a fait application de l’article L. 3141-19 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi « Travail » du 8 août 2016.
Aux termes de celui-ci, le congé principal peut être fractionné (c’est-à-dire pris en plusieurs fois), avec l’accord du salarié, pendant la période de prise de congés.
Et lorsqu’une partie du congé principal est prise en dehors de cette période, le fractionnement ouvre droit pour le salarié à un ou deux jours de congés supplémentaires, en
fonction de la durée du congé.
En l’espèce, un salarié souhaitait bénéficier des dispositions de l’article précité et de l’article 23 de la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils prévoyant l’attribution de deux jours ouvrés de congés supplémentaires lorsque le nombre de jours ouvrés de congé pris en dehors de cette période est au moins égal à cinq, ou d’un jour ouvré de congé supplémentaire lorsque le nombre de jours ouvrés de congé pris en dehors de cette période est égal à trois ou quatre.
En l’occurrence, le salarié avait pris 12 jours de congés payés en dehors de la période de prise du congé principal et a saisi la juridiction prud’homale pour demander le paiement de ses jours de congés supplémentaires.
Il est débouté de sa demande par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt au motif que, n’étant pas en mission pendant la période de prise de congés, il aurait pu poser ses congés payés pendant cette période. Autrement dit, selon le conseil de prud’hommes, dès lors que le salarié avait choisi unilatéralement de poser ses congés payés en dehors de la période de prise de congés et qu’il ne démontrait pas que c’était exclusivement à la demande de l’employeur, il ne pouvait se prévaloir des jours de congés supplémentaires
pour fractionnement.
La Cour de cassation n’est pas du même avis.
Elle rappelle que le droit à des jours de congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement, que ce soit à l’initiative de l’employeur ou du salarié.
Par conséquent, dès lors que l’employeur avait accepté le départ en congés du salarié en dehors de la période prévue à l’article L. 3141-13 du code du travail (à savoir du 1er mai au 31 octobre), les jours de congés supplémentaires pour fractionnement étaient dus, en application des dispositions légales et conventionnelles.
Ajoutons que si, jusqu’à la loi du 8 août 2016, le législateur prévoyait un octroi automatique de jours supplémentaires en cas de fractionnement du congé principal, les règles de ce fractionnement peuvent désormais être fixées par accord d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, par accord de branche (C. trav., art. L. 3141-21).
Un tel accord peut ainsi écarter les jours de fractionnement sans que l’accord individuel du salarié soit nécessaire (C. trav., art. L. 3141-21).
Si aucun accord collectif n’est conclu sur le sujet, la loi fixe le nombre de jours de congés supplémentaires auxquels le salarié a droit (C. trav., art. L. 3141-23).
Soc. 10 oct. 2018, FS-P+B, n° 17-17.890